Cercle Archéologique
Hesbaye-Condroz
Historique et objectifs
Le Cercle Archéologique Hesbaye Condroz a été créé en 1959 par des chercheurs enthousiastes. La collaboration avec diverses institutions scientifiques du pays est présente très tôt au sein du Cercle. Acquérant des compétences au fur et à mesure, les méthodes employées par les membres de l’ASBL sont devenues plus rigoureuses, et ce au profit de l’étude et du relevé scientifiques du patrimoine local. Fouilles programmées sur le long terme, mais aussi fouilles de sauvetage de sites archéologiques menacés de destruction par l’urbanisation ou l’aménagement du réseau routier, le Cercle a géré de nombreux chantiers depuis sa création. La protection du patrimoine archéologique est depuis toujours le leitmotiv de ses membres. Ces derniers ont d’ailleurs participé à la mise sur pied durant le XXe siècle de plusieurs sociétés de gestion et de protection du patrimoine tels que l’ARRA (Association Régionale pour la Recherche Archéologique) regroupant des communes de la Vallée de la Meuse, ou encore la FAW (Fédération des Archéologues de Wallonie).
Lors de la création du C.A.H.C., les membres ont prospecté sur au moins trois provinces wallonnes. Leurs activités se sont ensuite concentrées sur les rives de la Meuse moyenne et en particulier sur Amay qui est le berceau de l’ASBL, puis sur les plateaux de la Hesbaye et du Condroz. Le C.A.H.C. s’intéresse depuis ses débuts à l’étude des agglomérations romaines locales. Certaines ont fourni de précieuses informations sur l’organisation et l’évolution du vicus, les modes de construction, la vie quotidienne et l’aménagement des habitats, les activités artisanales et religieuses etc. Il faut ajouter à cela un intérêt pour des périodes variées qui vont de l’habitat Néolithique, aux fortifications celtes tout comme à l’habitat et à l’artisanat au Haut Moyen-Âge ou même d’époques plus récentes dans cette partie de la Wallonie. Des fouilles archéologiques menées par le C.A.H.C. sont toujours en cours en différents lieux de la région. Demandez plus d’informations et venez nous rejoindre !
Un président, un secrétaire et un trésorier s’occupent, avec l’aide des volontaires, de la gestion et de l’organisation du Cercle et de ses activités (conférences, visites, fouilles). Les membres du C.A.H.C. ont également contribué et participé à l’organisation de manifestations parfois plus importantes. Par exemple, des colloques sur «La civilisation mérovingienne dans la Vallée de la Meuse» (1985) ou sur le thème de «Chrodoara» (1997) ont mené à des échanges fructueux entre spécialistes de diverses disciplines.
Par ailleurs, un bulletin scientifique est édité depuis 1960, rassemblant des études monographiques ou des articles relatifs aux diverses recherches archéologiques réalisées par les membres du Cercle. D’autres articles venant du monde professionnel sont également acceptés dans notre revue. Le Cercle met à la disposition de ces membres une bibliothèque spécialisée en archéologie régionale et supra-régionale, et en histoire. On y retrouve bien sûr les Bulletins du Cercle. Cette bibliothèque, comportant plusieurs milliers d’ouvrage, s’est constituée au fil des ans par une politique d’échange avec les institutions scientifiques et les sociétés savantes de Belgique et d’Europe. Venez y faire un tour !
Les sites les plus significatifs fouillés par le C.A.H.C.
1. AMAY
Le vicus - agglomération secondaire romaine - routier et fluvial d’Amay-Ombret est installé sur les deux rives de la Meuse, à l’emplacement de son franchissement par la voie romaine de Metz-Tongres. Cette agglomération atteint son essor au milieu du IIe siècle de notre ère et, bien qu’elle soit partiellement détruite au milieu du IIIe siècle, elle restera occupée jusqu’au IVe siècle. La rive gauche, en plaine alluviale, est occupée par une bourgade de 3 hectares avec un relai routier (on y a retrouvé une hipposandale), des habitats munis de caves, des entrepôts et des traces d’activités artisanales. La rive droite, dont les petits bâtiments sont construits le long de la voie romaine à flanc de coteau et donc à l’abri des inondations. Un drain creusé les protège contre les eaux de ruissèlement de la colline. La zone centrale du vicus, près de l’accès au pont, semble consacrée aux édifices publics et une installation de bains publics plusieurs fois remaniée y est présente.
Amay présentait également un gué sur la Meuse probablement utilisé depuis l’âge du Fer jusqu’à l’époque industrielle, avant la construction d’un pont en 1872, et la canalisation de la Meuse. Ce gué avait toute son importance puisqu’il permettait un passage de la Hesbaye au Condroz. Fait remarquable, le gué avait déjà été délaissé à l’époque romaine au profit de la construction en amont d’un premier pont en bois (vers 10 av. J.-C.), remplacé par un second pont dont les piles de pierres maçonnées reposaient sur une fondation en bois (vers le milieu du Ier siècle de notre ère). Il s’en suit un hiatus d’environ 2000 ans avant qu’un autre pont ne soit construit (1872) et il faut attendre 1951 pour voir s’élever le pont actuel à 40 mètres en amont du pont romain. Les restes des sabots métalliques et des poutres de chêne qui servaient à la fondation du premier pont romain ont été découverts par le C.A.H.C. et l’équipe du Centre de Recherches Archéologiques Fluviales (CRAF Asbl) lors de fouilles sub-aquatiques en 1995 et 1999, et lors des travaux routiers en 1985/86 et du dragage du fleuve en 1992. Des clous de charpente, des outils de batellerie, des objets en bronze et de la céramique ont également été découverts à proximité du pont.
COMMENT UN PONT ROMAIN ÉTAIT-IL CONSTRUIT ?
Comme l’a décrit Jules César dans «La guerre des Gaules», il est connu que les romains construisaient des ponts afin de permettre à leur armée de traverser rapidement à pied et au sec les rivières, un avantage tactique non négligeable. Selon les explications de César, les piles du pont en bois étaient formées de deux pieux jointifs, liés et inclinés dans la direction du courant, puis enfoncés dans le fleuve à coups de butoir (mouton). Le second couple correspondant était incliné et enfoncé dans le sens inverse du courant. Plusieurs couples se succédaient suivant la largeur du fleuve. Des pieux obliques étaient ensuite ajoutés pour servir de contrefort et des pieux de protection étaient placés en amont des piles. Des poutres enclavées étaient posées entre les couples de pieux obliques opposés et des crampons métalliques pour bloquer le tout. Un bardage de bois longitudinal et des lattes était alors déposé entre les piles et servait d’assise horizontale permettant le passage. Malgré cela de nombreux cours d’eau étaient également franchis à pied grâce à des gués aménagés et pavés pour faciliter leur franchissement.
Pour le pont primitif en bois d’Amay, les fouilles ont révélé que des sabots métalliques entouraient la pointe des pieux pour les renforcer. Grâce à ces renforts, sa longévité devait dépasser le temps d’une campagne militaire et il a très probablement été construit pour le franchissement civil de la Meuse et non pas dans une visée militaire. Il semble que la construction ait été plus élaborée au niveau des piles, avec des alignements de pieux plus nombreux. Il sera remplacé par un ouvrage sur piles en pierres maçonnées éloignées l’une de l’autre d’environ 20 mètres et avec une fondation de bois encore plus large. Ce dernier pont romain aurait été plus résistant et semblait même encore être visible au Moyen-âge.
Les fouilles menées par le C.A.H.C. à la collégiale Saint-Georges d’Amay et dans ses alentours ont débuté en 1964. Elles ont révélés sous la Collégiale une succession d’occupations : un habitat de l’âge du Fer, une importante villa romaine à hypocaustes occupée jusqu’au IVe siècle de notre ère, des sépultures d’une nécropole chrétienne primitive associées à une église mérovingienne, puis carolingienne et enfin à une église romane. Le lieu a donc été utilisé maintes fois au cours des siècles. La structure de l’église actuelle reste romane (nef principale à 5 travées et grandes fenêtres, frise aveugle, chœur et transept oriental avec mur droit), elle sera néanmoins remaniée à plusieurs reprises, notamment par des peintures au Moyen-âge et des ajouts architecturaux et décoratifs au XVIe siècle (tour médiane), au XVIIe siècle (beffroi) et au XVIIIe siècle (nouveau cloître).
QUI ÉTAIT CHRODOARA ?
Le sarcophage de Sancta Chrodoara daterait du VIIIe siècle, et fut réalisé à l’occasion de la cérémonie d’élévation des restes de sainte Ode-Chrodoara par l’évêque de Tongres-Maastricht, Floribert. Il est actuellement visible dans la crypte archéologique communale promue par le C.A.H.C. et aménagée dans l’ancien chœur de l’église romane d’Amay. Découvert dans l’abside mérovingienne en 1977 par les membres du C.A.H.C., son couvercle en pierre monolithique interpelle par la beauté de sa décoration (entrelacs, rinceaux de vignes et texte latin identifiant clairement Chrodoara) et la figuration en pied de la gisante (un voile couvrant sa tête, signe de veuvage), une longue robe échancrée au cou (dame de l’aristocratie) et portant un bâton «d’abbesse» en forme de signes de la qualité et de l’importance de la défunte. En effet, Chrodoara, décédée au début du VIIe siècle appartenait à une illustre famille aristocratique à l’époque mérovingienne, le Clan des Chrodoïnides (ayant des possessions de l’Alsace à l’Argonne), lié aux Pippinides. Chrodoara est d’ailleurs mentionnée en 634, dans le testament de son neveu le diacre de l’église de Trèves, Adalgisel-Grimo. Elle aurait donc vécu dans la région d’Amay au cours de la seconde moitié du VIe siècle et le début du VIIe siècle, et y aurait fondé plusieurs sanctuaires. Abbesse ou non de celui d’Amay, cette information aura été oubliée lorsque le culte rendu à son encontre en aura fait une sainte près d’un siècle plus tard. Le beau sarcophage la représentant aurait alors été exposé dans l’église mérovingienne d’Amay afin de célébrer la mémoire familiale, et de renforcer, voire de sacraliser le pouvoir du lignage par une aura de sainteté. Ses reliques auraient été «transférées» par deux fois entre le XIe et le début du XIIIème siècle dans deux châsses d’orfèvrerie successives, consacrant à Amay le culte d’une riche veuve, patronne fondatrice d’une église devenue collégiale, Sainte Ode. Le sarcophage «démodé» est alors été enfoui sous le chœur de l’église du XIe siècle, se retrouvant ainsi dans l’abside mérovingienne.
Enfin, en 1997 et 1998, le C.A.H.C. a supervisé un programme de fouilles à l’abbaye cistercienne de la Paix-Dieu (Amay), dans le cadre d’une convention avec la Région wallonne. Ces fouilles précédaient un important chantier de restauration mené par le Ministère de la Région wallonne en vue d’y implanter le Centre de formation aux métiers du Patrimoine (Institut du Patrimoine wallon).
2. BRAIVES
Le site archéologique de Braives fut à l’origine de la création du C.A.H.C. Dès 1960, c.-à-d. dès le premier Bulletin publié par le Cercle, mention est déjà faite des fouilles qui sont réalisées dans ce vicus placé le long de la chaussée romaine Bavai-Cologne. Cave gallo-romaine, habitations en bois et torchis à toit de tuiles, magasin contenant des poteries sigillées non encore utilisées, fibules, monnaies et céramiques y sont découvertes. Une officine de potiers et des fours datés du Ier siècle de notre ère y ont également été mis au jour.
3. CLAVIER-VERVOZ
Après la conquête romaine, et ce dans le cadre de la civitas Tungorum (cité des Tongres), le Condroz a une identité propre de pagus Condrustis. Située le long de la voie Metz-Arlon-Tongres et aux sources du Néblon, l’agglomération de Clavier-Vervoz y aurait dès lors joué le rôle de chef-lieu du pagus. Le site a fait l’objet de fouilles archéologiques par le C.A.H.C. dès 1965 et lors de campagnes annuelles (fouilles programmées) pendant plus de 15 ans. Apparu au milieu du Ier siècle de notre ère, mais en grande partie détruit dès la seconde moitié du IIIe siècle, la bourgade romaine était formée par une quarantaine de bâtiments, dont des habitations rectangulaires alignées de part et d’autre de la route avec caves et galeries de façade, et des ruelles empierrées perpendiculaires à la chaussée. Au centre, un complexe thermal au plan compliqué s’étendait également sur une quarantaine de mètres, à côté d’un édifice à vocation sans doute administrative (curie). Un peu à l’écart se trouvait une zone artisanale consacrée à la poterie (une quinzaine de fours), une zone funéraire dont une riche sépulture en pierre décorée de sculptures, et un sanctuaire doté de deux temples (occupé jusqu’à la fin du IVe siècle, contrairement au vicus voisin). Un relais routier venait compléter l’agglomération afin d’accueillir les usagers de la voie romaine. De nombreux objets retrouvés lors des fouilles ont permis de dater les lieux et de comprendre un peu mieux les fonctions de chaque bâtiment : trésor monétaire, poteries variées (sigillée, terra-nigra, cruches et amphores, etc.), fragments de peinture à fresques polychromes dans le complexe thermal et dans le sanctuaire, verreries, robinet en bronze etc.
LE CONDROZ A L’ÉPOQUE ROMAINE
Les pagi (le pagus est une région délimitée et bornée comme le Pagus Condrustis, le pagus des Condruzes) ont des services administratifs semblables à la civitas (cité composée de l’ensemble du territoire et du centre urbain principal) avec une assemblée, des institutions, un lieu de culte public, des magistrats. Le pagus et le vicus (petite ville ou grosse agglomération justifiant un cadre administratif en son sein) sont des entités de niveau secondaire par rapport à la cité. Peu sont attestés dans les textes. Ils servent de relais à l’administration de celle-ci et ne sont pas indépendant d’elle.
Si le Condroz offre également des activités artisanales liées au passage de la voie romaine Metz-Tongres, les activités économiques majeures restent néanmoins l’agriculture et l’élevage comme à l’heure actuelle. La présence de beaucoup d’exploitations rurales dans le Condroz indique un territoire densément peuplé à l’époque romaine.
Le réseau routier. Établie au Ier siècle de notre ère lors de la mise en place du réseau routier principal, la voie romaine Metz-Tongres relie les deux cités, celles des Tongres et des Médiomatriques, sur environ 220 km d’un tracé quasiment linéaire. Elle a dû structurer le paysage traversé et de nombreux témoignages archéologiques jalonnent son parcours (agglomérations, stations, relais, gués, ponts). La portion de la voie qui est située entre Amay et Clavier est construite sur le modèle des routes romaines de l’époque, évitant les zones inondées, les fonds et les marécages sauf quand cela n’est pas possible, et avec une structure simple et adaptée aux nécessités locales. A Clavier-Vervoz, les fouilleurs ont retrouvé successivement : un creusement horizontal pour asseoir la route, une assise inférieure d’argile sableuse de 12 mètres de large, des dalles calcaires non équarries sur 4 mètres de large, puis des moellons sur 7 mètres de large et enfin un revêtement de cailloux et de graviers bordés de moellons sur chant constituant une surface carrossable dure. Hors agglomérations, la structure était parfois simplifiée, et des fossés latéraux permettaient souvent l’évacuation des eaux de la voirie.
Les relais routiers sont donc des établissements incontournables formant des chaines de haltes nombreuses le long des routes de l’Empire Romain, assurant l’hébergement ou le ravitaillement pour les voyageurs et leur véhicule et conditionnant ainsi les déplacements de tous.
4. ENGIS
Le cercle est intervenu sur deux fours de tuiliers gallo-romains à Hermalle-sous-Huy (Engis) en 1978.
Un chantier de plus grande ampleur est encore en cours sur la rive droite de la Meuse, à 7 km en aval de Huy, là où le fleuve vient buter sur un massif schisteux qu’il contourne. Le C.A.H.C. fouille depuis 1985 sur ce site de plusieurs hectares, le Thier d’Olne (Engis), qui domine le gué d’Amay. Ce sont les vestiges d’une fortification de l’âge du Fer ( La Tène ancienne, vers 400 av. notre ère) qui restent perceptibles sur le pourtour de la colline, mais surtout ceux d’une résidence aristocratique du haut moyen âge qui retiennent l’attention de l’Asbl. Habitats, édifices religieux ou funéraires, cimetières s’y sont succédés du VIIe au IXe siècles. À l’époque de Charlemagne (début du IXe siècle), l’installation comprend quatre vastes édifices construits en pierres maçonnées et disposés autour de deux cours séparées par un mur. L’ensemble est entouré d’une forte palissade en bois. Le développement rapide et la richesse de cet établissement sont le résultat de l’exploitation d’un vaste domaine agricole mais aussi, très vraisemblablement, de la perception d’un tonlieu sur la Meuse. Dans nos régions, peu nombreux sont les sites de cette époque permettant, comme au Thier d’Olne, une fouille exhaustive.
5. HUY
A Huy, les travaux menés pendant une vingtaine d’années par le C.A.H.C. à différents endroits de la ville ont profondément renouvelé la connaissance des origines de la cité au haut moyen âge. Révélant d’abord l’existence d’un véritable quartier artisanal mérovingien consacré à la poterie, au travail de l’os et l’orfèvrerie, les fouilles préventives effectuées dans le quartier de Huy-Petite ou Batta, avant la création du centre commercial actuel, ont démontré pour la première fois le développement considérable qu’a connu le sol hutois dès l’époque mérovingienne. Fonds d’habitations, ateliers et fosses remplies d’objets divers (bois de cervidés pour peignes en os, moules pour fibule en bronze, rebuts de fabrication de céramique ornés à l’aide de cachets etc.) ont fourni du matériel archéologique intéressant qui vient étayer les hypothèses d’occupation du quartier.
Une fouille de sauvetage réalisée dans la nécropole mérovingienne de Saint-Victor à Huy (rive gauche) a complété ces informations en faisant mieux connaître les contemporains de cet essor économique. Les tombes de la nécropole étaient très riches et elles ont révélés divers objets précieux - bouteilles en verre, céramiques, têtes d’épngles en argent doré et incrustées de grenat et d’émail, boucles de chaussures damasquinées, boucles de ceintures, colliers, boucles d’oreilles etc. -, mais aucun vestige osseux. Les plus anciennes sépultures datent du Ve siècle au VIIe siècle. Elles témoignent d’une population urbaine en pleine expansion. Le matériel exhumé démontre, quant à lui, des influences et des échanges commerciaux très diversifiés et parfois lointains.
6. OUTRELOUXHE
Le C.A.H.C. a fouillé les vestiges d’un relais routier romain de 1996 à 1999, sur une superficie d’environ 2.600 m². Outrelouxhe se trouve au Sud de la Meuse, sur la commune de Modave, dans le Nord du Condroz. Le relais romain s’étend sur le lieu-dit «Elmer» à Rausa, le long de l’ancienne voie romaine qui reliait Metz et Tongres et à 600 m de la petite station romaine de Strée. C’est lors d’une fouille de sauvetage, avant la construction d’un groupe de maisons, que les membres de l’Asbl ont pu découvrir un établissement romain qui a connu plusieurs phases d’aménagement successives. Les bâtiments construits en pierre ont été précédés par une installation en bois entourée d’un fossé de drainage et d’un talus qui délimitaient une aire d’une cinquantaine de mètres de diamètre, pourvue de deux entrées. L’occupation du relais s’est probablement faite du tout début du IIe au milieu du IIIe siècle de notre ère. Bien que le site soit fort arasé, des pièces de monnaies, des éléments de charrerie, d’harnachement et de parure en bronze, ou encore des objets en fer (outillage, hipposandale, clous…), des restes d’animaux (équidés, porc, bœuf…), de la verrerie, beaucoup de céramique et enfin des fragments d’une sculpture en pierre ayant pu représenter Mercure (dieu des voyageurs et du commerce) ont été retrouvés sur le site. Son implantation accolée à la voie romaine, le plan à cour centrale fermée vers l’extérieur avec accès direct à la route, et enfin les activités qui y étaient pratiquées confirment l’occupation en tant que relais routier isolé en milieu rural.
7. MODAVE
Depuis 2004, le C.A.H.C. effectue des fouilles programmées sur le site protégé du Rocher du Vieux-Château à Pont-de-Bonne (Modave). Le rocher calcaire, d’une superficie de 4ha, est inscrit dans un méandre du Hoyoux - une petite rivière qui coule dans le Condroz occidental à proximité de Huy. Le plateau est protégé par trois côtés naturellement abrupts et, à son sommet, plusieurs occupations y ont été découvertes par le C.A.H.C.. Au Néolithique, c’est le fossé d’une palissade de la fin du Ve millénaire avant notre ère qui a été mis au jour dans la partie sud-ouest de l’éperon. Une première occupation celtique du IVe ou du IIIe siècle avant notre ère fait état d’un habitat ouvert. Le petit plateau sera ensuite protégé, principalement dans sa partie orientale (là où l’éperon se raccroche au plateau de Limet, par un imposant rempart celtique – un murus gallicus – datées entre la fin du IIe s. et le début du Ier siècle avant notre ère. La porte associée à ce rempart, construite sur neuf poteaux, a complètement été détruite par le feu. Bien plus tard, à la fin de la période carolingienne (Xe s.), une seconde fortification est élevée sur les ruines de la précédente. Les murs de parement sont cette fois liés au mortier de chaux. Une impressionnante tour-porche permettait de contrôler ce point de passage vers l’intérieur de la fortification. Nous ne connaissons pas la fonction de ces remparts car les surfaces fouillées sur le plateau sont actuellement de trop petite ampleur.
QU’EST CE QU’UN MURUS GALLICUS ?
Le murus gallicus ou mur gaulois est un type de rempart construit à La Tène finale (IIe – Ier s. av. J.-C.). On en retrouve dans toute la Gaule. Décrit pour la première fois par Jules César lors de ces campagnes militaires contre les Gaulois, il associe le bois, la pierre et le fer. Le squelette du rempart est une superposition de grilles orthogonales de poutres de bois dont les intersections sont maintenues par de grands clous en fer. Les casiers obtenus, constituant le massif du rempart, sont colmatés de pierres et de terre. En façade, un mur de parement, reprenant les têtes des poutres, est élevé en pierre sèche. À l’arrière est aménagée une rampe en pente douce nécessaire à un accès rapide des défenseurs au chemin de ronde, lui-même protégé par un parapet en matériaux légers.
8. VAUX-ET-BORSET
De 1989 à 1998, en collaboration avec plusieurs institutions scientifiques belges et françaises, le C.A.H.C. a mis sur pied un vaste programme de fouilles sur deux sites néolithiques de Vaux-et-Borset (La Chapelle Blanche et Gibour). Le site de Gibour est un des rares sites européens à présenter, sur un espace réduit, une convergence de structures (fossés, habitations, silos) appartenant à plusieurs phases du néolithique ancien : le Rubané et le groupe de Blicquy/VSG. Ces implantations sont situées à environ 175 m d’altitude sur une crête et sur la pente méridionale du plateau limoneux hesbignon liégeois, proche de la Mehaigne.
Les fouilles concernant la période du Rubané, antérieur au Blicquien, ont permis de mettre au jour des habitations typiques, de plan rectangulaire, sur poteaux plantés dont la partition interne permet de reconnaitre une enfilade de plusieurs pièces et étables. La découverte de fragments de céramiques avec décoration «en ruban», d’outils en pierre parfois polis, et celle exceptionnelle pour nos régions d’une petite tête anthropomorphe en terre cuite renforce l’intérêt scientifique de l’ensemble.
L’occupation blicquienne, plus érodée que l’occupation rubanée, ne conserve plus ses plans de maison, mais ceux-ci peuvent être déduits des fosses latérales de construction. Ces vestiges prouvent néanmoins une occupation permanente en Hesbaye et relèvent d’activités villageoises : restes de torchis, vases de stockage, débitage de silex, meules et céréales. Des bracelets en schiste et les nombreux produits de la fabrication locale d’anneaux plats et de bagues en schiste ont été retrouvés dans les fosses. Les décapages extensifs réalisés en plusieurs campagnes ont aussi révélé des vestiges d’occupation protohistorique plus récents.